On oublie que cette native du pays de Galles parle couramment français : le fait qu’elle ait commencé au cinéma dans Les Mille et Une Nuits (1990) de Philippe de Broca, n’y est pas étranger. Du Masque de Zorro à l’Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle pour Chicago de Rob Marshall, cette brune brûlante a travaillé avec les plus exigeants : Steven Soderberg, Stephen Frears, Steven Spielberg. Elle a donné la réplique à Sean Connery, Brad Pitt, George Clooney, Tom Hanks, Tom Cruise… Comme toutes les stars, elle est passée aux séries. Mais A prodigal son, que l’on pouvait voir sur TF1, où elle joue un docteur exerçant en prison, ne connaîtra pas de saison trois. Catherine n’ose dire que cela l’arrange. Entre la ligne de vêtements et maquillage qu’elle s’apprête à lancer, ses deux enfants partis à l’université mais rêvant d’être acteurs, et son Michael Douglas de mari revenu après quelques tensions, Catherine Zeta-Jones, 51 ans, est au top de son énergie et de sa joie de vivre. En voici un échantillon.
On vous connaît plus comme l’une des grandes stars de cinéma d’Hollywood, mais aussi comme vedette de Broadway, passer à la télévision était une envie, ou un mal nécessaire ?
Catherine Zeta-Jones. Je n’aurais pas pris seule la décision de jouer le Dr Vivian Capshaw et m’intégrer au casting de A prodigal son, si mon amie Whoopi Goldberg ne m’y avait poussée. Mais je me sens encore plus actrice des planches, que de cinéma. J’ai commencé dans la comédie musicale Annie lorsque j’avais douze ans. J’ai justement apprécié l’esprit de troupe de la télévision, la qualité de l’écriture, et l’humour, qui se perd au cinéma.
Une des caractéristiques de votre personnage passe… par le ménage !
Névrosée de ménage, ce n’était pas un rôle de composition (Rires). J’adore faire le ménage moi-même, j’ai du mal à déléguer. Michael me demande parfois alors que je passe la serpillière de façon cathartique, si je ne vais pas finir par m’asseoir et arrêter de lui donner le tournis. Je ne vois pas de psy, je brique les sols. Nous avons beaucoup de planchers et ils se doivent d’être vraiment très brillants (rires).
Vous venez de créer une ligne de vêtements, vous voilà femme d’affaires comme de nombreuses actrices aujourd’hui.
Si vous vous entourez de gens compétents, alors vous pouvez enfin vous reposer un peu sur eux. Mais je ne demande jamais à quiconque de faire quelque chose que je ne ferais pas moi-même. Je m’amuse beaucoup à jouer à la femme d’affaires. Ma ligne s’appelle « Casa Zeta-Jones », avec des prix abordables pour toutes, et je l’avoue, je force ma fille à utiliser le maquillage pour les yeux que j’ai créée. Elle n’en a pas du tout besoin, c’est moi qui suis obsédée. Autrefois je voulais être décoratrice de maisons, aujourd’hui c’est la mode et la beauté. Ma fille Carys et moi avons posé ensemble pour Fendi, c’était magique de sentir ce lien entre nous.
Endosser tant de personnalités, de métiers différents… en quoi votre métier a-t-il influencé votre vie ?
Je me souviens avoir interrogé un jour George Clooney sur ses années passées à jouer un médecin dans Urgences, il m’avait dit que le plus dur était de dire ces longs mots scientifiques comme si c’était une seconde nature, et qu’il était vraiment capable d’opérer quelqu’un. C’est juste vraiment cela être acteur, avoir tant d’aplomb lorsque vous dîtes votre dialogue, qu’on ne doute pas une seconde que vous soyez Chef dans No reservations, ou épouse d’un riche homme d’affaires impliqué dans une affaire de drogue dans Traffic. Dans A prodigual son, je trouvais intéressant de comprendre comment un docteur très accompli se retrouve à travailler dans l’univers carcéral dangereux, et comment elle trouve son égal en la personne du chirurgien joué par l’excellent Michael Sheen.
Vous parlez bien français, le parliez-vous avec Kirk Douglas, lui aussi francophile ?
Surtout avec son épouse Anne qui est Belge, avec Anne, nous parlons en français. J’ai tant de raisons d’être fière d’être la belle fille de Kirk Douglas qui était tellement aimé dans le monde entier, et particulièrement en France où sa photo se trouve dans tant d’hôtels, de restaurants. Je me revois arriver au magnifique Hôtel du Cap lors d’un festival de Cannes et tomber sur Kirk en photo géante en train de faire du ski nautique dans un tout petit maillot de bain. Il avait commencé comme lutteur professionnel, il était si athlétique ! Quel homme fabuleux, quel destin. J’ai eu tant de chance de connaître et aimer Kirk. Pas une seule fois, où nous étions ensemble, ne manquait-il l’occasion de me dire qu’il m’aimait et que j’étais aussi belle à l’intérieur qu’à l’extérieur. Il me manque beaucoup.
Vous regardez vous-même les séries télévisées ?
Mais non, même pendant le confinement, Michael et moi avons essayé les plateformes, certaines montrent ses films, ou les miens, mais ce n’est pas notre truc. Alors qu’on nous disait : il faut absolument que tu regardes telle ou telle série, on s’est plutôt retranchés sur les classiques. Je peux revoir La valse des pantins de Martin Scorsese, ou Bienvenue mister Chance de Hal Ashby, sans jamais me lasser. Du coup on se sent très peu sûrs de nous lorsque nous parlons à nos amis qui semblent avoir vu tous les films et séries qu’il faut voir, lu tous les livres qu’il faut lire, et pris le temps en plus de faire du pain maison (rires).
Votre péché mignon ?
Michael et moi sommes tous deux de grands golfeurs, mais aussi drogués aux informations que nous prenons sur internet. Jusqu’à dire « faisons un pacte, tricotons à la place ou quelque chose comme ça » (rires). Devant l’avalanche d’injustices, de négativité et aussi de sensationnalisme, Michael a contribué à un site qui ne présente que les informations positives du monde, et il y en a ! Et être informés nous permet mieux d’oeuvrer dans le travail caritatif. Kirk a aidé énormément de gens, et nous essayons de suivre le chemin qu’il a tracé.
On a très envie de vous revoir au cinéma…
Cela arrivera. Je ne presse rien, on est encore dans une période spéciale, une des leçons à tirer est d’arrêter de nous précipiter sur tout. Pour l’instant j’ai juste hâte de voir quelle route vont prendre mes enfants, les voir s’élancer à leur tour dans le monde est fascinant.
Michael et vous semblez plus proches que jamais…
Quand les enfants sont partis, je lui ai dit « Hello, tu te souviens, c’est moi, la fille de Zorro que tu as rencontrée il y a vingt ans ! » (Rires). Oui, notre mariage, c’est du solide. Peut-être que cela vient aussi du fait que nous soyons nés le même jour, puisque nous partageons le même anniversaire. Mais attention, pas de la même année ! (rires).
Propos recueillis par Juliette Michaud
Photographies par Horst Diekgerdes
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