Une voix chaude, des mains bouleversantes… Inutile de lutter, vous êtes sous le charme. Du haut de son 1,98 m, ce sorcier charismatique aux allures de dandy a déjà deviné votre carte à jouer favorite et l’endroit où vous avez dissimulé le dé qu’il vous a confié. Bien sûr qu’il y a un truc. N’est-ce pas, David Jarre ? «Dans la vie, l’illusion est partout !» lâche-t-il dans un sourire énigmatique. Il aurait pu être une star planétaire de musique électroacoustique comme son père Jean-Michel, une icône du septième art comme sa mère, la divine Charlotte Rampling, ou un compositeur de BO de films triplement oscarisé comme son illustre grand-père Maurice. David Jarre est magicien. Et ça lui va bien. «La magie me permet de pratiquer tout ce que j’aime : jouer la comédie, faire le show, de la musique», dit ce surdoué multi-instrumentiste pour qui le chant, le piano, la guitare (on se souvient de The Two, son duo avec Ara Starck) et même la cuisine n’ont aucun secret. «Avoir des parents qui ont réussi en tant qu’artistes est très inspirant. Cela donne confiance en soi. D’autant qu’ils m’ont toujours encouragé. Ma grand-mère paternelle aussi, d’ailleurs.» A l’évocation de cette résistante de la première heure qui a connu la déportation et lui a appris à rire de tout, ses yeux brillent d’une émotion sincère.
David n’a pas besoin de faire voler une chaise, ni de couper une femme en deux pour nous émerveiller. S’immisçant dans notre quotidien à coups de dés, de pièces de monnaie ou de cartes à jouer, sa magie est un subtil mélange de close up (magie de proximité) et de mentalisme. «L’essentiel est de créer la surprise. Les choses les plus belles ne sont-elles pas celles auxquelles on s’attend le moins ? J’ai envie de distiller du bonheur aux gens, qu’ils ressentent ce que j’ai ressenti la première fois que j’ai découvert la magie.»
C’était en 1988. David avait 11 ans. Ce soir-là, l’illusionniste polonais Michael Vadini fait le show dans un hôtel. «L’atmosphère poétique, la finesse de son jeu, le lien qu’il avait réussi à établir avec le public… m’ont fasciné.» Touché par la ferveur du petit garçon, Vadini comprend qu’il a un don. Il lui enseigne quelques tours et lui offre une encyclopédie. David s’y jette à corps perdu, obsédé par le désir de réussir. Plus les années passent, plus la magie s’impose à lui comme une évidence. A 19 ans, il quitte le nid familial de Croissy-sur-Seine, et, pendant cinq ans, tous les étés, se produit aux terrasses des restaurants sur la Côte d’Azur… non sans achever ses études de philo et de lettres anglo-américaines à la Sorbonne.
Le bouche à oreille fonctionne. Une carrière internationale l’attend. Sollicité aux quatre coins du monde pour des événements privés, il partage l’intimité de Lady Gaga, Madonna, Elton John (l’un de ses plus beaux souvenirs) ou encore de certains présidents de la République. Toujours à l’affût de nouvelles expériences, cet instinctif a organisé pas moins de 70 shows par Zoom durant la pandémie – l’un d’eux ayant rassemblé jusqu’à 150 personnes. Depuis septembre dernier, c’est sur le canapé rouge de Michel Drucker, dans Vivement dimanche (France 2), que David promène son univers singulier une semaine sur deux. «Après vingt ans de magie, ouvrir un autre chapitre de mon métier est très excitant ! La télévision m’oblige à m’adapter à un format et à un rythme particuliers.» Non sans préserver cette proximité qui lui est chère. Un défi qu’il entend bien relever dans son futur spectacle dont il peaufine actuellement l’écriture. La forme, le fond, le lieu – tout promet d’être inattendu. «La magie doit rester quelque chose de rare !» insiste-t-il. A l’image de cet homme terriblement attachant qui, après trois petits tours, s’en retourne comme il était venu : sur la pointe de son élégance. Et ça, c’est tout sauf une illusion.
Patricia Khenouna
Photographie principale par Rasmus Mogensen
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