De l’adolescence à aujourd’hui, l’Anglaise Isamaya Ffrench a rebondi avec grâce d’activités en activités, de la plongée niveau semi pro, à la food avec un passage par Masterchef, puis à la danse dans la Theo Adams Company, pour aboutir, presque par hasard, au moment où elle finissait ses études de dessin industriel à la Central Saint Martin de Londres, au maquillage, par le biais de fêtes d’anniversaire où elle peignait le visage d’une flopée d’enfants en un temps record. Elle est aujourd’hui directrice internationale de la beauté chez Burberry et lance avec Ben Gorham la première game de maquillage Byredo. Portrait d’une artiste hors cadre, hors norme, aussi éclectique qu’irrésistible.
Qu’est-ce qui vous a fait devenir la maquilleuse que vous êtes ?
Isamaya Ffrench. Pour moi, le maquillage est une forme d’art. C’est ma manière préférée d’être créative, et ça n’a donc pas de limite. J’ai eu l’incroyable chance de travailler avec les personnes les plus créatives de cette industrie, qui ont accepté de me donner une chance à mes débuts, et qui continuent à me soutenir.
Pourquoi êtes-vous sollicitée par les marques les plus classiques, comme les plus extravagantes ?
I.F. Depuis dix ans maintenant, j’ai accumulé beaucoup d’expérience aussi bien dans le développement de produits, aux côtés de Byredo, Tom Ford, Yves Saint Laurent, Burberry, que dans l’univers de la beauté et la mode. C’est peut-être cette combinaison que les marques recherchent. Mais je pense que le travail acharné porte ses fruits. J’ai travaillé dur.
D’où tirez-vous votre univers si unique, si fantasque ?
I.F. Je ne regarde pas énormément de films, et je ne vais pas tellement voir des expositions. Je ne puise pas mon inspiration dans des références précises. Je la trouve dans ce que je vis, dans des conversations, dans la musique, dans les histoires… J’ai l’impression que c’est plutôt comme ça que me viennent des idées nouvelles ou des nouvelles manières de voir les choses. Rêver éveillée, ça marche aussi…
Pour vous, le make-up, c’est s’inventer des vies ou révéler plus intensément qui on est ?
I.F. C’est tout à la fois. C’est un outil et je l’envisage d’une manière purement créative: pour créer des illusions. Mais aussi comme un moyen de résoudre des problèmes. Par exemple, cacher le fait que je n’ai pas dormi pendant trois jours et que je travaille sur un million de projets à la fois !
Vous êtes souvent le support de vos propres créations, pourquoi ce choix ?
I.F. C’est juste plus simple comme ça. Je n’ai pas besoin de me soucier d’abîmer ma peau si j’utilise des colles ou des accessoires de science fiction. Je peux contrôler l’image directement. Et puis, c’est plus fun.
Quelle était l’idée directrice pour la première ligne de maquillage Byredo ?
I.F. Tout est dans la couleur. Tous les produits sont colorés mais de façon subtile, sans excès. Je la voulais très élégante et portable. Proposer de la couleur d’une manière moderne.
Comment l’eyeliner trouve-t-il sa place au temps du Covid ?
I.F. Avec un masque, il est vrai que l’attention se focalise sur les yeux. Mais je pense que si on continue à se maquiller, et peut-être même plus en temps de Covid, c’est parce que ça nous fait nous sentir mieux, en tout cas c’est le cas pour moi. L’eyeliner peut être utilisé pour définir le regard, mais aussi pour intensifier une personnalité, lui apporter plus d’expression, et je l’utilise dans les deux versions, en fonction de ce que je veux créer. C’est un outil plein de ressources pour les yeux, exactement comme la couleur, mais je ne les utilise pas toujours ensemble. L’un peut vivre sans l’autre.
Propos recueillis par Ellen Willer
Photographie par Hugo Yanguela
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