Si Jenny Hytönen n’était finlandaise, on écrirait qu’une étoile est née au Festival de Hyères, l’un des concours de mode les plus courus, raflant le grand prix Première vision et le prix du public en octobre dernier. On parlera donc d’une aurore boréale : un spectacle lumineux et rare. Inconnue avant le festival, la jeune femme a ébloui les jurés et les spectateurs avec une collection originale et unisexe, titrée Untitled, mariant la délicatesse du tricot et l’esthétique… Bdsm ! Autant d’excellentes raisons de la rencontrer.
Avec Untitled, vous jouez entre les extrêmes : de délicates jupes en mailles transparentes, des robes incrustées de cristaux et des pièces BDSM. Comment vous est venue cette inspiration inédite et qui a fait sensation au Festival de Hyères ?
Jenny Hytönen. J’ai toujours été fascinée par l’esthétique BDSM, par l’image forte qu’elle dégage. Et comme je suis une spécialiste du “knitwear”, c’est-à-dire du tricot, le travail de la maille, l’idée de marier les deux m’est venue naturellement. Je trouve que cela crée un joli contraste. En fait, cette collection est l’aboutissement de mes travaux universitaires, et je voulais voir jusqu’où je pouvais aller. Mais j’ai été très surprise par le succès de la collection. Je n’étais pas du tout préparée à cela !
Vous avez tout réalisé seule ?
Oui, chez moi, avec ma machine à coudre et les Kardashian en fond à la télé ! Je fais tout à la main, et cela prend énormément de temps. La maille, c’est une technique mathématique que j’aime et dont je suis une spécialiste, notamment pour Olivier Theyskens.
Untitled possède aussi une dimension futuriste inspirée par deux femmes artistes, Atsuko Tanaka et Rebecca Horn, qui explorent toutes deux le lien entre la technologie et le corps…
J’aime l’idée de créer des machines humaines qui auraient des émotions. On parle beaucoup de post-humanisme, de la transformation de l’humain qui appartient de moins en moins au monde animal. Ma collection est un mélange de la nature humaine et de sa représentation futuriste. Je veux continuer dans ces inspirations-là.
Comment évolue une styliste en Finlande, où n’existe pas d’industrie de la mode ?
On part à Milan ou à Paris ! Moi, j’ai grandi dans une petite ville finlandaise, puis j’ai déménagé pour la capitale à 17 ans. J’y ai continué mes études, liant toujours les arts et la mode. Mes modèles étaient Alexander McQueen et Azzedine Alaïa. J’ai déménagé à Paris il y a un peu plus d’un an !
Une bourse, deux collections capsules, dont une pour les Galeries Lafayette… la suite s’annonce bien pour vous. De quoi rêvez-vous ? Créer votre marque ?
J’ai effectivement plusieurs projets pour cette année, mais, plus que de me lancer sous mon nom, je voudrais travailler pour une grande maison.
Propos recueillis par Philippe Latil
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