Avec Hyperdrama, son quatrième album, le duo Justice s’impose haut la main et avec brio comme le meilleur groupe français du moment.
Débarqué de nulle part sur le dancefloor avec le tube imparable We Are Our Friend il y a maintenant une quinzaine d’années, le duo a, avec trois albums puissants et tonitruants, démontré avec brio qu’il valait bien mieux que le qualificatif jeté par des journalistes fainéants de Daft Punk low cost de ses débuts. De Cross (2007), qui mélangeait habilement les esthétiques disco et heavy metal en les enrobant de stridences métalliques, au funk retors de Woman (2016), en passant par le très pop et psychédélique Audio, vidéo, disco (2011), Justice aura porté les couleurs de la deuxième génération de la French touch avec génie, apportant un souffle d’air frais salutaire à une scène qui tournait en rond. Réputé pour ses live percutants en constellations de LED, son refus de se prêter au jeu de la célébrité, ses clips conçus comme de petits bijoux cinématographiques, le symbole de la croix décliné sous toutes ses coutures et sa rareté médiatique, le duo revient en forme olympique avec Hyperdrama. Un quatrième album terrassant d’innovations qui mélange avec génie deux mondes que tout semblait éloigner : le gabber et le disco. Ou la fusion contre-nature de ce courant de la techno hardcore qui a fait les beaux jours des années 1990 aux Pays-Bas et de la bande-son des seventies et son hédonisme libérateur à fleur de peau. «La filiation disco-gabber, si elle ne semble pas forcément évidente à l’écoute, est au final assez logique, explique le duo. Dans le gabber et le hardcore, on retrouve très souvent des samples courts de disco ou de funk, comme des extraits de James Brown, surpitchés et assemblés.» Rempli à ras bord de featurings de haut vol, de Kevin Parker du projet Tame Impala à Miguel, superstar américaine du R’n’B, du post-hippie Connan Mockasin au prince du renouveau jazz Thundercat, Hyperdrama s’annonce d’emblée comme le chef-d’oeuvre de Justice. Mélange de turbines à danser implacables (Generator), d’hymnes pop insolents (Neverender), de R’n’B du futur à frissonner de bonheur (Saturnine) et de ballades symphoniques (Explorer), Hyperdrama est un disque dont l’ingéniosité et la production filent le tournis. Tout en démontrant avec brio la capacité du duo à filer vers des territoires pop sans céder aux gimmicks de l’époque, à marier indé et mainstream dans le même élan, à s’imposer sur le marché américain comme de purs faiseurs de tubes et à faire danser le monde à l’unisson. La preuve s’il en était: le duo tête d’affiche lancera sa tournée estivale à Coachella, le festival des festivals, qui fait et défait les carrières mondiales !
Justice, «Hyperdrama» (Because), sortie le 26 avril. En concert au festival We Love Green, le 1er juin. A l’Accord Arena de Paris, le 17 décembre 2024.
Patrick Thévenin
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