Nous avons demandé à des grands chefs de commenter pour nous leur plat admirable, le plus beau, le plus glamour de leur carte. Réponses appétissantes.
Jean-François Piège : Mon Blanc à manger
«J’ai créé ce dessert en mémoire de ma grand-mère qui m’a appris la cuisine. Je n’ai cessé de vouloir recréer la recette de ma grand-mère, qui est malheureusement partie sans pouvoir me la donner. Après de nombreux essais, j’ai finalement créé ma version : dans l’idée d’une île flottante inversée – ma version avec de la crème anglaise cachée à l’intérieur du blanc d’œuf, recouvert d’un disque en caramel. Le cœur coulant se laisse découvrir à la première bouchée.» Ce dessert est servi dans le gastronomique Grand Restaurant et il est proposé à l’intégralité des convives, quel que soit le menu choisi. Ce dessert a été servi le premier jour de son ouverture en 2015, et n’a cessé d’être servi depuis.
Chef du restaurant Le Grand Restaurant,
7 rue d’Aguesseau, Paris VIIIe
www.jeanfrancoispiege.com
Glenn Viel : Les Couteaux les pieds dans l’eau
«J’ai choisi cette recette car elle me rappelle mes souvenirs d’enfance, les pieds dans l’eau dans ma Bretagne natale où j’allais ramasser les couteaux. Ma cuisine reflète mes souvenirs, qu’ils soient récents ou plus dans l’enfance, je m’inspire des produits qui me galvanisent, je souhaite transmettre des émotions.» Dans cette recette, tous les ingrédients rappellent la pêche : les couteaux dépassent légèrement de leur coquille, le jus rappelle l’eau trouble de la mer, la tombée de basilic les algues, le croustillant de la chips de tapioca-algues et le crémeux de pignons de pin rappellent, eux, les grains de sable.
Chef du restaurant L’Oustau de Baumanière,
Les Baux-de-Provence
www.baumaniere.com
Niko Romito : Les Linguine aux gambas rouges et homard
«J’ai choisi les linguine aux gambas rouges et homard, qui sont un plat particulièrement beau dans leur simplicité, mais “glamourous”. J’ai une passion pour les pâtes en général, et les pâtes longues en particulier. Avec les crustacés, le mariage est parfait, spécialement quand il s’agit des crevettes rouges de Sicile, mes préférées car si juteuses et savoureuses, et du homard, pour sa texture et sa douceur. La sauce qui enveloppe les pâtes a un goût intense et très élégant, grâce au procédé utilisé pour l’obtenir et à la petite touche de fraîcheur apportée par du jus de pamplemousse et des herbes. Les crustacés sont laissés presque crus, pour respecter leur goût et la texture. Irrésistible !»
Chef du restaurant Il Ristorante,
Bulgari Hôtel Paris, 30 avenue George-V, Paris VIIIe
www.bulgarihotels.com
Yu Tanaka : Le Marron d’Aubenas
«Je suis né et j’ai grandi au Japon, dans une région où la nature est reine. Le Marron d’Aubenas est un dessert inspiré de mon enfance et plus particulièrement des promenades familiales dans la forêt. Ma saison préférée a toujours été l’automne, en raison des cueillettes de marrons et de châtaignes. Le visuel de ce dessert s’apparente à un morceau de branche tombé pendant l’automne, à l’image et aux couleurs d’une balade en forêt à cette époque de l’année. Gustativement, ce dessert est un doux mélange d’acidité. En plus des mandarines, nous retrouvons aussi ce côté automnal avec les châtaignes et les noix. Une crème glacée au rhum rehausse les saveurs. Ce dessert, malgré son côté gourmand, se distingue par sa légèreté. C’est ma création iconique servie au restaurant Epicure.»
Chef pâtissier du Bristol,
112 rue du Faubourg-Saint-Honoré, Paris VIIIe
www.oetkercollection.com
Dominique Crenn : Le Tartare de betteraves
«J’ai choisi cette recette dont les ingrédients rappellent mon voyage au Mexique : la Californie faisait autrefois partie du Mexique, et, grâce à mes voyages au Yucatán, je m’en suis inspirée pour mêler l’histoire de ce pays. Lors de mon dernier voyage, j’ai collaboré avec le chef Roberto Solís, du restaurant Nectar, et je me suis inspirée de certaines des saveurs que j’ai goûtées, en particulier le recado negro. Les betteraves sont servies en deux services : l’une est assaisonnée comme un ceviche au leche de tigre, et la seconde est une traduction de ma part, qui suis d’origine française, avec une sauce bordelaise.»
Elle a été la première femme aux Etats-Unis à se voir décerner en 2018 3 étoiles au Guide Michelin pour son restaurant Atelier Crenn, à San Francisco.
Cheffe du restaurant Golden Poppy,
24 rue Cadet, Paris IXe
www.goldenpoppy.com
Romain Meder : Concombre, saucisse d’huître et algue
«J’aime ce plat, car il réunit deux produits à la délicatesse incroyable, mais complexes à travailler : le concombre et l’huître. Le concombre est rôti vivement d’un côté et gardé cru de l’autre, pour le caraméliser sans perdre sa fraîcheur. Pour l’élever, j’ai imaginé une saucisse d’huître, dont l’enveloppe protège la matière tout en conservant ses sucs, son juteux et ses arômes iodés et de noisette. La liaison des deux par une sauce inspirée du mole mexicain, dont les graines de tournesol torréfiées rappellent le côté fruits secs de l’huître, permet de se balader dans l’assiette sans jamais s’ennuyer. Un plat peu commun mais étonnamment réconfortant et gourmand!»
Chef du restaurant Les Chemins,
Domaine de Primard, Guainville (28)
www.lesdomainesdefontenille.com
Stéphanie Le Quellec : La Langoustine vanille et sarrasin, blanc-mangerdes pinces
«Mon plat le plus glamour est la langoustine vanille et sarrasin, blanc-manger des pinces. C’est également mon plat signature. La langoustine est, selon moi, le crustacé le plus noble. Sa délicatesse est sublimée par la vanille et relevée par le sarrasin grillé. Un hommage à la Bretagne de mon mari! J’adore la langoustine, il n’y a pas plus fin ni élégant. Dans cette recette, j’utilise 100 % du produit. Le choix du produit est orienté sur sa taille. Il faut que la langoustine soit grosse, entre 2 et 4 kg! La vanille de Tahiti ramène de la douceur, un côté floral, rond et gourmand, proche de la saveur de la langoustine.»
Cheffe du restaurant La Scène,
32 avenue Matignon, Paris VIIIe
www.la-scene.paris
Amaury Bouhours : Le Plat d’huîtres
«C’est un amuse-bouche qui est servi à l’ensemble de la table pour un moment de convivialité et de surprise, la fumée froide dévoilant petit à petit le produit. L’idée du plat était premièrement de mettre l’huître à nouveau au centre d’un menu de dégustation. Elle est servie après les canapés, permettant de “rincer” le palais avant le début du repas. J’ai décidé de pocher l’huître afin de changer la texture, qui peut parfois déplaire. Je l’associe à un granité de gin français pour ramener la fraîcheur.»
Chef exécutif du restaurant Le Meurice Alain Ducasse,
228 rue de Rivoli, Paris Ier
www.alainducasse-meurice.com
Cyril Lignac : La Galette craquante, tourteau au curry Madras et avocat
«Ce plat est né en 2017 au restaurant Le Bar des Prés. Je voulais un plat très graphique pour contrebalancer l’esthétique épurée du restaurant. Visuellement, ce plat évoque la maîtrise technique, la minutie. Je voulais qu’il soit glamour, couture. Il nous a fallu plusieurs mois d’essais pour trouver la parfaite découpe. Je n’imaginais pas le succès qu’il pourrait avoir. Les clients ont fait de ce plat une signature.»
Chef du restaurant Le Bar des Prés,
25 rue du Dragon, Paris VIe
www.bardespres.com
Akrame Benallal : L’ Ananas charbon
«On m’a appris à préparer l’ananas en l’épluchant et en le servant avec son sirop. Et j’ai tenté autre chose. J’ai mis un ananas victoria entier, dans sa peau, au four à 160 °C, pendant 35 minutes. J’ai découvert la quintessence de sa saveur et de son parfum. Il fallait donner l’impression qu’on allait manger quelque chose de carbonisé. J’ai fait un caramel foncé, noirci par du charbon de bambou, versé au fond de l’assiette et sur l’ananas tout entier. J’y ai joint une glace caramel demi-sel. On obtient plusieurs nuances de noir et plusieurs saveurs d’ananas.»
Chef du restaurant Akrame,
7 rue Tronchet, Paris VIIIe
www.akrame.com
Matthieu Carlin : Le Chocolat fleur de jasmin
«Il se compose d’un biscuit moelleux, d’une mousse au chocolat, d’un crémeux chocolat au lait-jasmin et d’un sablé à la fleur de sel. Je voulais une création au chocolat capable de ravir les amateurs, mais aussi de séduire tous les autres par une saveur élégante et délicate. Le thé au jasmin apporte de la finesse et accompagne le chocolat. J’ai utilisé deux chocolats, du noir et du au lait. Dans cette création, le jeu de texture est important avec un crémeux très onctueux et un sablé à la fleur de sel qui réveille les papilles.»
Chef pâtissier de l’Hôtel de Crillon,
10 place de la Concorde, Paris Ier
www.rosewoodhotels.com
Nina Métayer : La Pavlova
«Pour moi, la pavlova représente l’essence même du glamour en pâtisserie, une création qui a parcouru les continents pour devenir un classique, évoluant sans se figer. Son lien avec la danse m’offre une inspiration constante dans la conception de son design, dans le mouvement, la rendant aussi ravissante que délicieuse. Elle offre également une expérience adaptée à toutes les saisons, la transformant en un véritable intemporel dont on peut profiter toute l’année !»
Nina Métayer a été élue meilleure pâtissière du monde.
Dossier réalisé par Sandra Hirth
Photographie principale : De gauche à droite, de haut en bas. Glenn Viel, Stéphanie Le Quellec, Nina Métayer, Matthieu Carlin, Cyril Lignac, Niko Romito, Romain Meder, Amaury Bouhours, Yu Tanaka, Akrame Benallal, Dominique Crenn, Jean-François Piège.
Crédit photos : Virginie Ovessian, Benoit Linero, Charly Hel, Victor Bellot, Philippe Vaures Santamaria, Pierre Monetta, Laurent Fau, Olivier Goy, Pierre Olivier, James Bort
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