Elle est l’un des nouveaux visages les plus envoûtants d’Hollywood. Le sortilège date d’il y a sept ans. Souvenez-vous, un beau jour, sortie de nulle part, on découvrait la grâce farouche de Margaret Qualley dansant, comme possédée, dans la publicité pour Kenzo de Spike Jonze. Un grain de folie, du glamour déjanté en robe verte, une Isabelle Adjani des temps modernes, l’une de ses idoles. «C’est cette pub dingue qui a mis le feu aux poudres», nous confiait-elle pour la sortie d’Il était une fois Hollywood, de Quentin Tarantino, film dans lequel, à nouveau complètement habitée, elle incarnait une hippie tout sauf peace and love.
Car, à 28 ans, Margaret Qualley a déjà volé la vedette à Brad Pitt, campé la muse de Bob Fosse (Ann Reinking, encore une de ses idoles), dans la série Fosse/Verdon, donné la réplique à sa mère, Andie MacDowell, dans la série Maid – elles y jouent respectivement une jeune maman tombée dans la précarité et sa mère givrée. Ou encore fait monter la température dans Stars at Noon, le thriller tropical de Claire Denis. «Quand la réalisatrice de Beau travail vous appelle, vous accourez ! J’ai d’autant plus aimé l’expérience que je connais bien le Panama, dont j’adore l’atmosphère. Mon père (l’ex-mannequin norvégien aux yeux bleus perçants Paul Qualley) s’y est installé quand j’avais 14 ans. J’avais même déjà séjourné dans le grand hôtel où a été tourné une partie de Stars at Noon.»
Margaret Qualley, c’est une beauté atypique, à la fois classique et troublante, une aura tendre et brûlante, une fraîcheur déconcertante et une féminité revisitée, à la fois très sage et prête à tout envoyer voler en éclats. Pour Margot Robbie, qui a produit Maid pour Netflix, «Margaret possède ce “je ne sais quoi en plus” qui fait qu’on devient une star». Pour Claire Denis, Margaret Qualley a «quelque chose de sauvage, de joyeux et fantasque, comparable à la pétillante Paulette Goddard des Temps modernes de Chaplin.» Une spontanéité peut être due, aussi, au fait que celle qui a pris la tête de la relève hollywoodienne n’a jamais convoité ce rôle. «J’ai grandi loin du show-business, dans un ranch merveilleux du Montana, puis dans une petite ville de la Caroline du Nord. Ma passion était la danse, mais j’ai vite abandonné après plusieurs grandes écoles, parce que, pour y arriver, il faut être tellement bon. Je n’aurais pas pu me démarquer. Quand j’ai emménagé à New York, à 16 ans, c’était pour devenir mannequin.» Milieu dans lequel elle se sent vite mal à l’aise. «Ce n’était pas un mode de vie très sain pour moi…» Elle participe tout de même à plusieurs campagnes, défile pour Valentino, Alberta Ferretti et Chanel, qui en fait sa muse. Elle a même clôturé en mariée la saison automne-hiver 2021-2022 du show Chanel haute couture. (Apparaissant en parallèle en ligne dans une vidéo réalisée par Sofia Coppola, dans laquelle elle endossait tour à tour l’ensemble des looks de la collection. So chic !) Alors quel ne fut pas notre émoi, cet été, de la voir se marier, pour de vrai, cette fois, en ballerines et robe de satin blanc très simple, très pure, confectionnée sur mesure par Chanel, avec le sympathique leader du groupe Bleachers, Jack Antonoff ! Parterre hallucinant de stars du cinéma et de la pop (elle compte Lana Del Rey parmi ses amies, sa sœur aînée, Rainey Qualley, est chanteuse). Et nouveau look : cheveux coupés au carré, “la” coiffure de sa mère dans Quatre mariages et un enterrement.
Mais comment cette princesse est-elle devenue l’une des nouvelles reines d’Hollywood ? «A 17 ans, mon petit ami de l’époque m’a emmenée à un cours d’improvisation. Comme beaucoup d’enfants qui ne veulent pas exercer le même métier que leurs parents, je n’étais pas emballée par l’idée, mais je suis tout simplement tombée amoureuse de l’art dramatique. Je me suis dit : “Oh, mon Dieu, je dois faire en sorte que ça fonctionne, parce que c’est tellement amusant.” Etant perfectionniste, j’ai cherché des écoles de théâtre, pour finalement suivre les traces de ma sœur qui avait fait la Royal Academy of Dramatic Art de Londres. J’ai étudié Shakespeare pendant un été. Ensuite, c’est allé très vite. J’ai eu beaucoup de chance, et j’en suis plus que consciente et reconnaissante.» A la publicité de Spike Jonze, succéderont quelques petits films indépendants, puis la série métaphysique The Leftovers, la comédie d’action The Nice Guys aux côtés de Ryan Gosling ou encore Seberg avec Kristen Stewart : «Une actrice fascinante.» Mais c’est Quentin Tarantino qui exploite enfin tout le potentiel d’ange et démon de cette fausse ingénue. «Jouer pour Quentin Tarantino avec un tel casting était dément ! Pour le tournage, je me suis installée chez ma sœur à Los Angeles et je me rendais sur le plateau dans une vieille bagnole qui tombait tout le temps en panne, j’arrivais tous les jours couverte de poussière. J’ai tellement aimé ce tournage que chaque seconde passée avec toute cette équipe si joyeuse, solaire, m’exaltait. La joie est tout, c’est mon moteur. D’ailleurs, Tarantino, qui aime passionnément le cinéma, dit que “vous faites un bon film parce que vous l’aimez très fort”. Il se pourrait qu’il ait raison (Rires).»
La réussite de Margaret Qualley est tout sauf un hasard : cette soif de cinéma, elle la possède. A venir ? Deux films événements : Pauvres créatures, du réalisateur de La Favorite, Yórgos Lánthimos, aux côtés d’Emma Stone, une version gothico-féministe de Frankenstein sélectionnée à Venise. Et Drive-Away Dolls, le premier film de fiction solo d’Ethan Coen (coécrit avec son épouse), une comédie loufoque en forme de road-trip lesbien ! Sans oublier Fred & Ginger, de l’anglais Jonathan Entwistle, dans lequel Margaret Qualley incarnera Ginger Rogers aux côtés de Jamie Bell en Fred Astaire. L’héroïne de Kenzo World et Billy Elliot qui prennent ensemble leur envol ? La grève des acteurs à Hollywood a, hélas, reculé la sortie des deux premiers films au début de l’an prochain, le tournage de Fred & Ginger a été mis sur pause. Mais quoi de mieux que l’attente pour susciter le désir ? Et permettre de rêver… «Qu’on me propose une grande comédie romantique», lance Margaret. Le meilleur conseil qu’on lui ait jamais donné ? Celui de sa mère, peut-être ? «J’étais tellement contente qu’elle accepte, à ma demande, le rôle dans Maid. Travailler avec ma mère a été extraordinaire. J’ai beaucoup de chance, car, dans la vie, elle a toujours été juste une maman normale, qui vous répète de bien mettre de l’écran total… ce genre de choses. Mais, si vous, voulez me prodiguer des conseils, je suis toujours preneuse ! (Rires.) Sérieusement, j’ai besoin que quelqu’un me dise quoi faire ! J’en suis toujours à me pincer de connaître Brad Pitt et d’avoir tourné avec Claire Denis. Je n’ai pas encore bien réalisé qu’être actrice est mon métier !»
«Pauvres créatures», de Yórgos Lánthimos, avec Emma Stone, Mark Ruffalo, Margaret Qualley, Willem Dafoe… Sortie en France le 17 janvier 2024.
«Drive-Away Dolls», d’Ethan Coen, avec Margaret Qualley, Geraldine Viswanathan, Pedro Pascal, Matt Damon… Sortie en France le 24 janvier 2024.
Et toujours sur Netflix : «Maid», série de Molly Smith Metzler, avec Margaret Qualley, Andie MacDowell, Nick Robinson,
Raymond Ablack…
Juliette Michaud
Photographie principale : Peter Yang / AUGUST
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