A l’occasion des 10 ans de leur label Mosaert, le trio Paul Van Haver, aka Stromae, sa compagne Coralie Barbier et son frère Luc Van Haver lance une nouvelle capsule de vêtements 100% écoresponsable qui arbore le tout nouveau logo du label. C’est l’occasion pour eux de faire le point sur leur parcours. Rencontre à Paris.
Ta dernière scène à Paris date de 2018 avec votre tout premier défilé de mode au Bon Marché…
Stromae. C’est un chouette souvenir. La vidéo a atteint les 10 millions de vues… Enorme, pour une vidéo de défilé !
Nous sommes tous impatients de te retrouver sur scène avec un nouvel album…
Stromae. Nous nous sommes mis en pause à la naissance du bébé. A un moment, j’avais un certain dégoût, j’ai dit des choses dans les interviews… mais, en fait, je n’ai jamais arrêté. C’est indispensable pour moi. Donner des dates, c’est compliqué, mais ça avance !
Quel est le chemin parcouru depuis la création du label il y a dix ans ?
Stromae. Nous avons créé le label pour rester producteurs de la musique, ça nous a amenés à produire des visuels cohérents avec la musique : les clips, le live et la communication. Puis sont venus des projets transversaux, comme les vêtements, l’architecture, la réalisation de clips pour les autres…
Coralie. Au départ, Paul voulait juste avoir un regard sur les clips.
Stromae. Moi, je payais déjà tout, mes clips, mon studio… j’apprenais le métier, mais en fait j’étais déjà producteur. Luc me donnait son avis sur toutes mes compositions, il a commencé stagiaire, il est maintenant coactionnaire. En 2012, Coralie est arrivée… Chez Mosaert, on travaille à trois. Nous adorons brainstormer et réfléchir ensemble, alors pourquoi ne pas le faire pour d’autres ? Cela nous a permis de réaliser des clips avec d’autres artistes.
Quels artistes sont venus vous voir ?
Stromae. Orelsan, Vitaa, Bigflo et Oli, Disiz la Peste…
Et Coldplay récemment ?
Stromae. C’était une collaboration, il m’a demandé de traduire un texte. Je ne savais pas qu’il voulait que je chante sur scène.
Luc. Il y a eu Yael Naim, pour son titre Coward.
Stromae. C’est mon meilleur souvenir de clip qu’on ait fait !
Luc. Et ceux pour Major Lazer, Dua Lipa, Billie Eilish, et le film officiel de la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2024. Ce qui nous intéresse c’est de toucher tout le monde. Comme pour le clip de Dua Lipa, nous nous sommes posé la question de comment faire comprendre un message mainstream. Comment faire un clip intéressant, ludique où on fait comprendre ses sentiments.
Comment la mode est-elle née de la musique de Stromae ?
Coralie. A la base, mon travail était de créer un univers pour Paul, à sa demande. La première capsule est née en 2014, éditée en quantité limitée, fabriquée en Europe avec des artisans locaux. Avec l’idée de se détacher de l’image de Paul au fur et à mesure des collections. Les gens n’avaient pas envie d’être déguisés en Papaoutai !
Luc. Quel que soit le médium sur lequel nous nous exprimons, nous avons toujours essayé d’être pertinents. A un moment, nous avions beaucoup de pression pour faire du merchandising un peu bête et méchant, comme la cover d’un album sur un tee-shirt, ce que nous avons toujours refusé.
Cette dernière capsule de vêtements est pour la première fois 100% écoresponsable ?
Coralie. Oui, en coton bio, ou en matériau recyclé, jusqu’au packaging et aux étiquettes de lavage. Nos pièces sont unisexes, écologiques, éditées en petite quantité, en Europe. C’est une histoire d’éthique. La matière du blouson est réalisée à partir de tapis d’hôtel et de filets de pêche…
Fêter ces 10 ans est aussi l’occasion de révéler un nouveau logo avec un nuage ?
Coralie. C’est celui du label, que ce soit pour la mode ou la musique, le processus créatif est identique. Le petit nuage représente cela… pour le clin d’œil, il fait un M. On voulait qu’il soit coloré. Notre fils de 2 ans a compris que c’était un nuage. Il fallait que ce soit facile à reconnaître et à dessiner même par un enfant.
Vous travaillez avec l’architecte Kengo Kuma…
Stromae. Nous travaillons sur une œuvre pérenne au sein de la future station de métro Saint-Denis Pleyel.
Luc. Le désir de Kengo Kuma est de faire entrer la nature dans les villes. Nous avons voulu renforcer le message en créant un arbre en suspension. L’idée est de marquer les visiteurs avec ce message simple mais très clair : faire croire que la gare a été construite autour de cet arbre.
Après dix ans, appréhendez-vous les choses autrement ?
Stromae. Oui, c’est la maturité. Maintenant, je sais que les journées n’ont que 24 heures, et qu’il est possible de faire les choses le lendemain. Il y a aussi le bébé. Pour moi, se lever le matin, c’est déjà un concept ! (Rires) Je ne compose plus la nuit.
Coralie. Maintenant, il s’arrête à 17 heures pour aller chercher notre fils à la crèche. Cette obligation permet d’avoir du recul. Le recul permet la même exigence. Je pense que ça revient au même que d’avoir la rage jusqu’à se faire mal.
Stromae. Avant, c’était vraiment la douleur et cette obsession de chercher la douleur, comme si elle était indispensable pour faire des choses bien. C’est la vision romantique de l’artiste. Aujourd’hui, je pense que l’on prend beaucoup plus de plaisir et, je l’espère, avec un résultat aussi bon. Ce qui m’importe aujourd’hui, c’est de faire des liens et des ponts entre les cultures.
Propos recueillis par Anne Delalandre
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