Sylvain Fischmann, le créateur et fondateur de Rives, la maison parisienne de costumes sur mesure, travaille une nouvelle allure. Plus contemporaine, en alliant créativité, savoir-faire et qualité.
Quelle était votre ambition lorsque vous avez créé Rives ?
Sylvain Fischmann. Proposer une créativité tout à fait portable. Avant tout, nous faisons des costumes. Nous travaillons avec des ateliers traditionnels parce que, si c’est industriel, on ne peut plus faire ce que l’on veut. Nous pouvons allier qualité et savoir-faire à une créativité débridée parce que nous ne sommes pas corsetés par des programmes informatiques. Nos ateliers ont des modélistes, des couturiers, couturières, qui fabriquent le vêtement.
Le costume sur mesure, c’est votre cœur de métier ?
S.F. Absolument. Même si on développe de plus en plus de pièces de streetwear, ce qui nous a conduits à créer trois lignes d’univers différents : Le Lab, qui nous permet d’expérimenter des choses qui n’ont quasiment plus de rapport avec le costume… et d’assumer le kimono, la cape ou le baggy… la ligne Day to Day, qui propose des bombers, des vestes peignoirs… et Cérémonie, car les gens se marient à nouveau, mais de façon très différente, et ils n’ont plus envie du costume classique. La tenue devient de plus en plus importante pour les hommes. Avant, il y avait des codes qu’on respectait, et on laissait en retrait sa personnalité. Aujourd’hui, personne n’a envie de ressembler à un pingouin quand il va à l’église ou à la mairie !
Quel est l’essentiel, pour vous ?
S.F. Nous ne cherchons pas le truc ou le gadget. Nous cherchons le vrai. Nous travaillons essentiellement sur la silhouette, et c’est pour ça que, très rapidement, nous avons fait le choix de travailler avec un des plus beaux ateliers et avec les plus beaux tissus du monde. La silhouette est notre signature.
Comment la définissez-vous ?
S.F. C’est assez structuré, on essaye de jouer avec les différents volumes. De longues jambes, ou l’inverse, un long buste, du très large pour le bas et plutôt ajusté en haut… On n’est clairement pas une marque excentrique. Si on va trop loin, on n’est plus une marque de sur-mesure de costumes, et si on va pas assez loin, on est comme les autres. Etre comme les autres est ma plus grande hantise !
Votre point de vue sur le nœud papillon ?
S.F. On en fait beaucoup. La cravate représentant plutôt le côté conventionnel.
Et la pochette ?
S.F. La pochette est pour moi un moyen d’expression. Elles sont fabriquées en Italie, sur commande. On a le choix entre une centaine de soies différentes, roulottées à la main. Pour cette collection, nous sommes allés chercher de la dentelle de Calais, pour le savoir-faire français ancestral. Cela exprime quelque chose sans que ce soit trop ostentatoire, trop excentrique. C’est ça qu’on cherche : la subtilité.
Le nom Rives est en référence à Paris ?
S.F. Oui, on cherchait un nom intemporel qui évoque Paris. Au pluriel, comme les deux rives, les deux faces d’une pièce, toujours cette ambivalence entre la tradition et la créativité.
Comment se passe la réalisation d’un costume sur mesure ?
S.F. L’important, c’est de passer du temps avec chaque personne. On fait du 100 % sur mesure. On est les seuls à avoir une proposition aussi large, du plus formel au plus streetwear. Le premier rendez-vous dure une heure, on parle énormément du besoin et de l’envie de la personne qui vient nous voir. C’est pour ça qu’on a autant de choses à montrer dans le magasin. On a plus de 250 vestes différentes à montrer, parce qu’un client qui arrive et qui dit : «Je voudrais quelque chose qui sort un peu de l’ordinaire mais je ne sais pas trop quoi» a besoin d’exemples. Le second rendez-vous est consacré à la réalisation, et là on va y passer au moins deux heures. On sait faire plus vite pour des gens pressés ou pour des gens qui recommandent chez nous. On poursuit la discussion, on formalise les choses et on détermine chaque élément qui constitue le vêtement. Et, évidemment, on prend toutes les mesures, parce que c’est ça, le cœur du métier, car la base, c’est quand même de proposer un vêtement dont la forme correspond parfaitement à la silhouette qu’on souhaite avoir !
Vos clients sont fidèles ?
S.F. Oui. Se laisser guider par quelqu’un qui vous connaît et qui n’est pas là pour vous vendre quelque chose mais pour vous conseiller, c’est formidable, parce que l’expérience d’achat n’est pas la même. Dès qu’une personne me dit : «J’ai envie de faire un costume avec vous», je n’ai plus rien à lui vendre, il ne reste plus qu’une relation d’échange, et c’est génial.
Propos recueillis par Anne Delalandre
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